LES SOINS DES AMAZONES
Le corps féminin est traversé par des fictions sociales, capitalistes et genrées qui la façonnent et la conditionnent, autant d’attentes oppressantes qui régissent son apparence et tendent à son homogénéisation. Aussi bien critique qu’amusée, autant méfiante qu’intriguée, l’artiste se prête au jeu de la fiction. À travers différents médias et supports, Baillargeon s’intéresse au dispositif de production de cette fiction du féminin, en particulier celle de la perfectibilité et de la jeunesse éternelle. Dans ses performances pour la caméra, elle se met en scène en train d’utiliser des produits et appareils de beauté de manière maladroite et déviante qui détourne les gestes de soin indiqués par les modes d’emploi et les tutoriels qui en font la promotion. À la fois modèle et cobaye, elles déclinent tour à tour ces outils promotionnels en un rituel, un sacre ou encore une ascèse. Ces gestes témoignent du rapport à son corps : vieillissement, prise de poids, sexualité, accouchement, post-partum, ménopause sont abordés toujours d’une manière qui les intègre à cette fiction du féminin. Soigner son image, laisse entendre l'artiste, c'est aussi assumer ses faiblesses, ses imperfections, ses fatigues. Les images présentées en viennent à constituer un système de relations qui entrecroise l’industrie cosmétique, les réseaux sociaux et les rituels de soins. Au fil des œuvres se dessine un certain horizon : le corps qui s’incarne par le rituel est aux prises avec sa propre matière. Aux différentes « techniques de soi » qui confinent et capturent les fictions du féminin, le corps formule une réponse simple : je ne suis pas une utopie, je m’invente, je me soigne. Réponse ambigüe, coextensive à la fiction de la perfection féminine, mais qui produit aussi une forme revendicatrice d’autofiction
LES SOINS DES AMAZONES
La partie vidéo de ce projet juxtaposent des images de différents instruments visant à corriger les imperfections physiques ainsi que des gros plans de son propre visage appliquant maladroitement les rituels beautés proposées par ces produits. Sans trop pontifier les moments passés à tenter de nous parfaire, cette mono-bande observe la propension où l'artiste se laisse influencer par les modèles esthétiques dominants. Ici, contrairement à l’approche des vidéos publicitaire où les femmes débordent de joie à suivre les prescriptions, son expression est apathique tout en mettant l’accent sur la redondance ses mouvements. Il en résulte des séances de soins esthétiques dysfonctionnelles où règne une certaine absurdité au profit de l'art.
LES SOINS DES AMAZONES @squarefemininity
Galerie des arts visuels de L'université Laval
Dans le cadre du 50 ème de l'école des arts de l'Université Laval
Commissaire: Lisanne Nadeau
Crédits images: Michel Boucher
SQUISHY TOYS GUMMY FACE /\ ZONES FLASQUES DU PODIUM
Dans cette performance mise en ligne en mars 2021, l'artiste met en lumière cet état de narcissisme trouble du regard uniformisé des réseaux sociaux. Par un rituel de beauté de chewing-gum et de pâte à pain, l'artiste place en discordance la réalité de nos corps pluriels et périssable en contraste avec l'idée du caractère perfectible du physique féminin. Dans le contexte universitaire, où l'action s'est produite, cette performance a rendu hommage aux artistes féministes Hannah Wilke et Ana Mendieta qui ont influencé le parcours artistique de l'artiste.
Coproduction: La Bande Vidéo
Crédit: Ricardo Savard